vendredi 29 mai 2015

Escapade dans les Sporades (en route pour...)

Parti d'Andros en même temps que Mangareva, le bateau de mes amis Hervé et Sophie, je ne tardais pas à prendre un cap plus Ouest qu'eux qui descendaient maintenant sur Kea tandis que j'avais décidé d'aller voir le port de Rafina qui est situé sur le continent et non loin de l'aéroport d'Athénes. En effet, ce pourrait être une option intéressante que de s'y amarrer cet été afin d'aller chercher à l'aéroport ma puce et sa copine qui viennent me rejoindre au mois de juillet, dans l'hypothèse de retourner vers les Sporades. Plutôt que de partir d'Athènes, partir de Rafina nous fait gagner une bonne cinquantaine de milles à vue d'oeil. Ceci me fournit d'ailleurs l'occasion de vous parler un peu plus tard de la bataille de Marathon...








Rafina est situé sur le continent dans le golfe d'Evvia, une ile toute en longueur qui mesure environ 160 Kms, qui borde le continent et qui s'en rapproche d'une cinquantaine de metres seulement à Khalkis, ville où se trouve le pont à tiroir qui s'escamote pour laisser passer les bateaux, mais n'anticipons pas...



Aprés m'être assuré de la faisabilité d'un amarrage dans Rafina pour juillet, je me dirigeais vers le nord dans le golfe d'Evvia.



Depuis Rafina, c'est environ 127 miles à parcourir entre Evvia et le continent, mais pour l'heure je visais une première escale à Voufalo que le guide indiquait être un abri sûr et charmant.



Chemin faisant je longeais donc la célèbre plaine de Marathon,









qui fût le théâtre de la bataille du même nom qui opposa l'armée perse aux hopplites athéniens vers – 430 bc (mais vous vérifierez la date dont je ne suis pas tout à fait sûr). Deux choses ont rendues cette bataille célèbre, la première est la victoire des grecs obtenue malgré un rapport de force très défavorable et la seconde étant la façon dont les athéniens ont déjoué la ruse des Perses qui réembarquant une partie de leurs forces terrestres sur leur flotte de guerre, comptaient faire le tour de la péninsule en bateau afin de débarquer côté Athènes et se rendre maîtres de la ville pendant que l'armée athénienne continuerait à se battre à Marathon. L'histoire rapporte que non contents de remporter la bataille, les guerriers grecs se sont immédiatement mis en marche forcée afin de rejoindre leur ville avant les Perses afin de pouvoir être en mesure de la défendre. Ils firent tant et si bien qu'ils arrivèrent sur les rivages d'Athènes au moment où la flotte perse se présentait ce qui les découragea totalement d'y débarquer.










Mais le temps que je vous conte cette histoire, me voici en vue de Voufalo :



 



Comme nous étions le vendredi 15 mai, que l'endroit était bien tranquille et que, qui plus est, le passage du pont de Khalkis est surtaxé le week-end, je décidais de rester mouillé à Voufalo quelques jours.



Alizée au mouillage à Voufalo



Entre temps, j'avais passé une annonce pour prendre un équipier pour ce voyage. Et comme j'avais quelques contacts, je pouvais facilement depuis cet endroit retourner sur Rafina pour aller en chercher un qui arriverait par avion depuis Athènes éventuellement. Finalement c'est Quentin, un jeune de 21 ans qui fût le plus rapide, il était en Turquie et rentrait d'un voyage de près d'un an en Asie. Après quelques échanges de mails, il fut convenu qu'il embarquerait à Khalkis.



Le dimanche, je me mettais donc en route vers Khalkis avec l'idée de faire un stop en face d'Eretria où parait-il il existe un chantier naval parmi les moins onéreux de Grèce, afin d'y prendre quelques infos sur leurs tarifs de grutage et de carénage. Je pourrais ainsi m'y rendre le lundi matin avant de reprendre ma route vers Khalkis et mon RV avec Quentin.




                                       Finalement c'est pas les moins chers, j'ai mieux !!




                                                              Le port d'Angistri




Je mouillais donc près de la plage et consacrais mon aprés-midi à divers bricolage alternés de baignades et décidais de rester là pour la nuit.

Le lendemain je me dirigeais vers le petit port de Khalkoutsi afin d'y laisser Alizée amarré le temps de rendre visite au chantier.



L'entrée dans ce port n'est pas simple, et dés l'abord la couleur est annoncée : 2,1 m de fond !! Qu'est ce que ça va être à l'intérieur ? D'ailleurs un homme accourt à l'extrémité de la jetée en me faisant moults gestes pour me faire comprendre d'aller doucement, chose que j'avais parfaitement l'intention de faire vu le peu d'eau qu'il devait y avoir sous la quille d'Alizée !! Aprés un passage critique où le sondeur afficha 1,7 m (glurp!) juste à l'entrée, ce qui est souvent significatif d'un envasement ou ensablement de l'entrée d'un port, les fonds redescendaient un peu : 2,1 m / 2,2 m pas vraiment les abysses mais avec ça on flotte !! Et je me mettais à quai sous le flot de conseils de prudence (à défaut de flots tout court dans le port) du gars qui m'aidait à prendre les amarres.

J'ai un peu mieux compris ensuite la raison de ces appels à la prudence. Au chantier, on m'a un peu expliqué que ce port est blindé d'ancres et de cordages en tout genre qui reposent au fond et que le moindre remous vous propulse en surface une quantité inextricable de cordages en tout genre lesquels comme on le sait n'ont qu'une passion avouée, celle de s'entortiller joyeusement autour de votre hélice, du gouvernail et de la quille !! Sachant qu'en plus l'eau de ce port est marron et totalement opaque, je vous laisse deviner le plaisir qu'il y aurait à devoir plonger pour s'en défaire...

Vous pouvez donc imaginer facilement qu'armé de cette nouvelle connaissance des lieux je suis sorti de ce piège sur la pointe des pieds !!! Si j'avais pu, j'aurais même chargé Alizée dans l'annexe et j'en serais sorti à la pagaie !!

Oufff, ce coup-ci Poseidon était avec moi et je n'ai repris le cours normal de ma respiration que lorsque j'ai vu 5m affichés au sondeur, aprés avoir fait toute la sortie du port en apnée !!



Cap sur Khalkis, mais non sans un arrêt mouillage déjeuner/sieste dans une petite anse fort accueillante, mais je vous laisse en juger par vous-même :









Deux petites mers intérieures à parcourir dont la première est balisée pour cause de hauts fonds et j'arriverai à Khalkis.






Lorsque l'on arrive à Khalkis en venant du sud (ce qui est mon cas) on passe d'abord sous un grand pont suspendu









...et puis on arrive dans une petite mer presque complétement fermée. Tout au Nord un pont routier barre le passage c'est le fameux pont à tiroir de Khalkis.









Je dis fameux, non pas à cause de ce dispositif de tiroir (le pont s'escamote sous la route lorsqu'il s'ouvre) qui est la version moderne de ponts plus anciens qui se sont certainement succédés ici, puisque la distance entre le continent et l'ile d'Evvia n' y est que d'une cinquantaine de mêtres. Mais parce que l'étroitesse du passage, conjuguée à la grande longueur de l'ile d'Evvia (environ 165 kms) fait que se sont quasiment deux mers qui se rencontrent ici et que cela génère deux phénomènes : le premier est une marée d'une amplitude pouvant aller jusqu'à 1,5 m (d'aprés le guide) et le second un très fort courant vraisemblablement induit par ladite marée. Ce qui rend fameux l'endroit, c'est que le célèbre mathématicien grec Aristote se serait rendu lui-même sur les lieux afin de trouver une explication au double phénomène...et qu'il aurait séché !!



Les deux phénomènes sont localisés à la proximité immédiate du passage. Cependant le courant peut y atteindre 7 à 8 nœuds !! Quand on sait que c'est la vitesse maximum que peut atteindre Alizée avec son moteur (et il n'est pas question de passer à la voile – ce qui est d'ailleurs proscrit) voilà de quoi corser l'affaire !! Seconde complication, les deux rives étant si proches, c'est en fait la même ville qui s'est développée de part et d'autre et il n'est donc pas envisagé par les autorités d'interrompre la circulation incessante entre les deux berges dans la journée. Ce sera donc la nuit....et pour que la navigation puisse se faire en sécurité, chaque soir les coast-guards calculent l'heure d'étal de la marée (et donc de moindre courant) afin de déterminer l'heure d'ouverture du pont et donc de franchissement pour les bateaux. La veille on m'apprend c'était 3H du matin, idéal pour faire deux nuits en une !! De plus le pont n'est ouvert que pendant 20 minutes, donc il ne faut pas traîner, sinon on est bon pour attendre 24h de plus...



Arrivé en début d'aprés-midi, j'ai fini par accoster tant bien que mal. Alizée soumis à un fort courant descendant et qui générait des courants inverses et tourbillonnants dans le renfoncement aménagé le long du quai était en même temps sous l'influence d'un vent d'une douzaine de nœuds arrivant par le côté de l'AR et l'écartant du quai, pas simple la maneuvre ! Finalement la deuxième tentative fut meilleure que la première (comme quoi on apprend toujours de ses échecs) :-) et rapidement amarré j'étais enfin à Khalkis.



 



Quentin vint me rejoindre et fit son embarquement, aprés avoir fait 16h de car depuis la Turquie, pas rien !! Après l'avoir accueilli par un jus de fruits, je lui indiquais tout de suite sa cabine que j'avais préalablement préparé et lui proposais l'usage de la douche dans la foulée, j'imagine le bien que ça doit faire une bonne douche dans ces cas-là !!



Les démarches effectuées auprés des autorités portuaires étant accomplies, nous avons eu la surprise (et le plaisir) d'apprendre que ce soir-là le pont ouvrirait à partir de 21h30 !! Cool.



Il ne nous restait plus qu'à faire un peu connaissance et aller faire quelques courses, Quentin ayant refusé ma proposition d'aller se reposer. Nous avons repéré un quai parfaitement convenable pour nous accueillir une fois que nous aurions franchi le passage, il n'y avait plus qu'à attendre le soir.



Alertés par la VHF à 21h30, nous avons franchi le passage vers 22h00 devant une foule compacte amassée de chaque côté sur les berges, certains nous appelant « Alizée » d'autres nous faisant des signes de la main, sympa. Comme je l'ai fait alors remarqué à mon nouvel équipier « c'est la gloire » ;-)



Le lendemain, j'appareillais seul, Quentin dormant encore. Je pense qu'il avait besoin de récupérer. Plus tard dans la journée et compte tenu des vents et de la distance que nous avions à parcourir, je décidais que nous ferions étape à Loutra Adhipsou un petit port (et station thermale?) au Nord d'Evvia.



La très belle et très sauvage côte Nord-Ouest d'Evvia :










Joli mais tout petit port que ce Loutra Adhipsou dans lequel nous avons dû faire rentrer Alizée au chausse-pied, mais au moins il y avait du fond !! Village un peu endormi, mais nous ne sommes que mi-mai, et puis un splendide hotel sur le bord de mer ainsi qu'un espèce de réservoir où une conduite amenait une eau bouillonnante de laquelle s'échappait de la vapeur nous fit penser à de l'eau provenant d'une source thermale. Quelques mêtres plus loin, la coloration jaune-orangée de la terre nous confirma le bien fondée de cette hypothèse, il s'agissait bien de soufre.









Simple escale sur notre route vers les Sporades, nous repartons dès le lendemain matin, avec un beau ciel bleu....au-dessus de nos têtes, et bien noir là-bas, justement dans la direction où nous faisons route. D'ailleurs quelques temps plus tard, le ciel lointain se balafre d'éclairs, je crois que cela va être pour nous !! Je prépare le bateau et la tenue de pluie, nous sommes parés à prendre la douche.



Pour sortir du golfe d'Evvia il y a des îlots qui barrent le passage et trois possibilités. La première, la plus courte, est aussi la plus étroite, elle est bordée de rochers et de hauts-fonds et de plus elle se négocie par un virage à 90° juste avant des récifs. Inutile de dire que sous une averse orageuse au cours de laquelle la visibilité peut être réduite à quelques mêtres, et ne laisser que le GPS comme guide, cette option n'est pas celle que j'envisage en priorité !



La deuxième ne nous rallongerait pas beaucoup mais elle est également bordée de récifs et la troisième est vraiment très large et franche. Ces deux options peuvent en plus s'aborder directement et on a donc la possibilité de faire route au compas en cas de visibilité réduite.



Finalement l'orage qui sévissait en plein sur ces îlots s'est peu à peu déplacé au fur et à mesure que nous nous en rapprochions, et c'est en définitive par la voie la plus courte, mais pas la moins belle que nous avons réduit notre distance aux Sporades.











Un peu trop éloigné encore pour une arrivée de bonne heure a Skiathos, la plus occidentale des Sporades, j'ai finalement décidé d'entrer (mais à peine) dans la baie de Volos pour y mouiller la nuit près d'un petit port que j'avais répéré dans le guide. C'est ce qui nous a permis de voir de façon très fugace un phoque moine, espèce protégée en méditerranée, juste avant qu'il ne plonge, échappant ainsi à nos observations.



Le lendemain matin, réservoirs d'eau remplis pour cause de rareté dans les îles, nous étions parés pour notre dernière étape avant notre arrivée...dans les Sporades !

Alizée fait le plein d'eau à Pighadi








...qui feront l'objet de la suite,

 A bientôt !








1 commentaire:

  1. Quel plaisir de retrouver Alizee au cours de ses nombreuses escapades,toujours accompagné de nombreux détails intéressants, de superbes photos, et......cerise sur le bato.....de petits films qui nous réjouissent! A très bientôt

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