Amorgos,
Harmonie,
Harmonie, contrastes, quiétude...
Une mélodie de trois notes jouées sans accroc, formant une œuvre idéale dans une partition mêlant architecture naturelle et constructions humaines :
Je suis sur l'île d'Amorgos.
Nulle part ailleurs je n'ai senti une telle plénitude, quand cette trinité m'envahit emportant avec elle toute pensée construite ou élaborée, ne laissant la place qu'aux impressions, aux ressentis. Quelque chose de primitif, simple mais porteur d'essentiel.
Lorsque ces sensations s'imposèrent à moi, de toute évidence, je compris que je me trouvais face à une sorte d'absolue grandeur.
Spectateur privilégié d'une mise en scène si parfaite qu'elle semble être l'oeuvre de quelque chose de plus grand que moi, de plus grand que nous tous, à l'élaboration de laquelle, pourtant, nous sommes conviés en permanence et à laquelle nous participons parfois.
La visite de Chora est un pur moment de bonheur. C'est un dédale de ruelles qui montent, descendent, se croisent, se partagent et se retrouvent, dans lequel j'ai plaisir à me perdre. Chaque recoin chaque détour recèle comme dans un écrin, une merveille d'harmonie. Pour commencer, il importe de savoir que le bleu du ciel, et de la mer qui en est le miroir, est né ici à Amorgos : c'est le bleu originel, pur, limpide et profond, le bleu père de tous les bleus, le bleu brut, le bleu suprême. Un bleu natif, entier, dur, sans mélange ni concession. Il est d'ailleurs une autre personne à l'avoir découvert avant moi et qui ne s'y est pas mépris : c'est Luc Besson. Lui aussi a vu, a été emporté, subjugué et nous a transmis cette même idée simple, primaire, essentielle dans son œuvre dont le titre-même forme le résumé en même temps que le tout : "le Grand bleu" dont une partie fut tourné ici. Maintenant je sais. J'ai vu, je sais pourquoi ici, je sais pourquoi ce titre...
C'est aussi pourquoi les villages sont bâtis au plus haut. C'est aussi pourquoi les maisons sont blanchies à la chaux, d'un blanc à s'y brûler les yeux, tendant leurs murs comme des bras, en une sorte d'imprécation, vers cet azur qui leur renvoie leur propre pureté dans un partenariat éclatant. C'est pourquoi les toits sont construits en terrasse, car en pointe ils pourraient blesser le ciel. C'est aussi la raison pour laquelle les volets sont peints en bleu, afin d'habiller en harmonie de ton le reflet céleste dans les vitres : évident.
Ici un bougainvillée hurle ses couleurs éclatantes ayant enfin trouvé un support à sa mesure. Là une poterie a été peinte d'un jaune explosif que le soleil ne désavoue pas. Tout est couleur. Et toute cette beauté réside dans la simplicité, tons primaires et contrastés, formes géométriques basiques dans un mariage élégant au résultat envoutant.
Je suis attablé en terrasse de ce café,
(le "Triporto")
enveloppé d'une musique douce mais rythmée, une brise de Sud jouant avec mes cheveux. La patronne, originaire de Thessaliki au Nord de la Grèce continentale est établie dans Χωρα (Chora) depuis 11 ans et comme elle m'explique, il lui semble avoir franchie les portes du temps et vivre dans un autre siècle.
C'est l'occasion pour moi de vous décrire un peu l'endroit. Chora est à 7 kms du port Katapola. Tout d'abord vous conviendrez avec moi que nous sommes les générations de la plage et du bord de mer. Hormis la mer, point de salut, surtout pour les vacances ! Il n'en fut pas toujours ainsi et paradoxalement dans ces îles. Si le bord de mer à toujours été utilisé, sinon peuplé c'est parce qu'il a toujours représenté la porte d'accés à deux des principales ressources vitales dans les îles : la pêche et le commerce. Malheureusement c'est de la mer qu'arrivait également les vicissitudes, le danger et parfois la mort : les pirates. De nos jours, ce mot est porteur d'une certaine forme de romantisme, sans doute par amalgame avec les corsaires (ce qui est tout autre chose) et certainement aussi à cause de l'impact du film "Pirates des Caraïbes". Mais il en était tout autrement à l'époque où elle sévissait (et d'ailleurs de nos jours encore dans certaines zones). Les nombreuses îles grecques étaient donc très exposées, forcément mal défendues : peu peuplées, peu ou pas dotées de garnison ni de moyen de défense : des proies toutes désignées. C'est la raison pour laquelle les iliens préféraient vivre dans les hauteurs et que souvent "les Chora" sont perchées, et construites à l'écart des bords de mer. Mieux, comme ici à Amorgos, on ne voit pour ainsi dire pas la mer depuis le village, ce qui par une logique imparable signifie également l'inverse. A cette époque déjà, pour vivre heureux il valait mieux vivre caché !
Ajoutez à cela que les ruelles sont si étroites et les déclivités si prononcées qu'aucune circulation automobile ne peut y être envisagée, même le Dax reste à la porte du village, et vous comprendrez que 2 des principaux fléaux de notre époque n'ont pas ici droit de cité : le bruit et la pollution. "Un autre siècle" disait Julie la patronne du café.
J'ai l'avantage de visiter les Cyclades hors saison, il est vraisemblable que le siècle doit rattraper Julie et son île en pleine saison et que la Chora doit bruisser des nuisances de la "civilisation" jusque dans la plus étroite de ses ruelles. Mais là c'est paisible...
Amorgos est aussi riche de sa diversité et parmi elle, j'ai choisi comme toutou-riste qui se respecte d'aller rendre une petite visite à son fameux monastère de la Panagia (vierge) Chozoviotissa. Vous savez, car un jour vous en avez forcément entendu parler, ce monastère construit à flanc de falaise dans un endroit où même les chèvres n'osent défier le vide. Et c'est ici, dans ce lieu aussi hautement improbable, que des moines édifièrent ce monastère il y a quelque chose comme 1000 ans, et y résident encore de nos jours. 300m en contrebas, le bleu de Luc éclate de toutes ses nuances et joue avec le ciel et les falaises aériennes et sous-marines. Un souffle d'éternité et de matin du monde flotte ici et il semble que rien n'y pourra jamais rien changer. Je contemple ce spectacle qui est joué pour moi seul, il n'y a pas âme qui vive, et un air pur et nourricier envahit mes poumons. Je vis, je vois, je perçois, je sens, tous mes sens sont sollicités et comblés. Merci Amor... Amorgos.
Les moines ont des horaires d'ouverture (comme La Poste), aussi je ne visiterai pas le monastère, étant là en-dehors des heures ouvrables, mais peu importe, j'ai vu ce que je devais voir....
(le Monepati - sentier de mule - qui mène au monastère)
...vertigineux, non ?
Je me suis ensuite rendu dans le Nord de l'île pour y visiter le village de Tholaria :
Et le village de Lankada qui lui fait face, sur l'autre versant de la très belle baie d'Egiali que les deux dominent :
(Camille, est-ce qu'il est pas mignon avec sa p'tite tête au milieu de l'arbre ?)
Et puis il y a bien sûr le port principal de l'île : Katapola
(en vue panoramix)
(mode de déplacement très usité dans les îles et utilisation familiale habituelle, 3 sur le scoot, des fois plus - pas de casque, la liberté, le bonheur - d'ailleurs voir le sourire du pilote)
En face de Katapola il y a un petit port de pêche, typique et à croquer, j'ignore son nom, a moins que cela ne fasse partie de Katapola. C'est là que le soleil met le feu chaque soir avant de tirer sa révérence :
C'est beau comme une île grecque vous ne trouvez pas ? Comment voulez-vous ne pas quitter cet endroit avec regret ?
Quelques rencontres ici aussi fort sympathiques : un couple de terriens d'Annecy, Alain et Isa ainsi qu'Anil leur fils si plein de vie, la terreur des poissons.... j'espère qu'on se reverra un jour :-) je vous fais coucou !!
Je salue aussi Yuyu et Eva que je ne reverrai sans doute jamais, et Vangelis le boss de la Taverna si gentil mais qui n'était pas sur sa terrasse au moment de mon départ. Le coup de corne de brume en partant c'était pour toi et Suzanna ta compagne.
Le vent souffle et les orages grondent....arrivé ici depuis Schoinousa (on lit parfois Schinoussa, mais j'ignore pourquoi, je trouve l'autre traduction mieux adaptée à notre langue) avec 33 noeuds de vent et des creux de 4 m, les conditions sont pour l'instant plus clémentes, pour l'instant...de toutes façons, il faut partir.
Je ne sais pas si c'est une bonne idée de faire de la publicité pour un tel coin de paradis, mais je vous connais, vous n'êtes pas des touristes de masse, hein ?
Si vous le pouvez venez à Amorgos, comme moi vous serez conquis.
A bientôt !
On aimerait bien, c'est certain, venir faire un tour dans ces endroits si pittoresques et enchanteurs!! Je t'envie pour tout ce que tu découvres et ressens, ici ça y est on a mis le chauffage, oh! seulement le matin, car nous avons toujours de belles journées ensoleillées, avec des températures très douces qui réchauffent vite l'intérieur de nos maisons.
RépondreSupprimerEn effet, les portes et les volets sont bleus... car ils sont aussi les ouvertures donnant sur le ciel de la même couleur...
RépondreSupprimerCar ils sont les yeux des demeures, comme nos yeux sont les ouvertures qui nous permettent de contempler toutes les beautés du monde. Pouvaient-ils être d'une autre couleur ?
Des fois ils sont rouges ou vert, mais cela vient surement des yeux doux des marchands de peinture qui font des promos sur les couleurs dont personne ne veut, c.a.d toutes celles qui ne sont pas bleues...hihihi
RépondreSupprimerBonjour Alain, C'est Alain de Trisonia, veinard, à qui ce beau périple donne à voir de si magnifiques paysages, et de faire de belles rencontres.Ton récit et de superbes photos donnent envie d'y retourner au plus vite, pour moi se sera au printemps 2015.Ma visite des Îles Ioniennes c'est bien passé et la présence de Miss Oups, ma coéquipière, y est pour quelque chose. Toujours de bonne humeur, curieuse de tout, attentionnée, j'ai été gâté. Et il lui a fallu de la patiente car le moteur de mon guindeau a rendu l'âme, et ce n'est qu'à Lefkas après être passé par Argostoli, que j'ai trouvé la solution. Ithaque nous a réservé un accueil particulier, fait de calme et d'orages impressionnants. Je te souhaite bonne continuation, merci de nous faire rêver, au plaisir de se revoir , prends soin de toi.
RépondreSupprimerBonjour Alain, ça me fait bien plaisir d'avoir de tes nouvelles et de savoir que tu as bien profité des iles de la mer ionienne. Je suis persuadé que certains des ciels d'orage que tu as rencontrés sont maintenant rentrés dans toute leur puissance dans ton petit carnet à spirale...
RépondreSupprimerMiss oups avait donc des biceps pour remonter l'ancre à la main, mais c'est toi qui devait être patient parce que c'est plus long comme ça !! hahahaha
J'espère aussi que nous aurons l'occasion de faire nos routes se croiser à nouveau.
A bientôt